Seigneur, nous voici ! Pèlerins de l’Inconnu, hommes et femmes de passage, religieux et laïcs, au service d’un Dieu de passage. Nous voici, en transit et pleins de reconnaissance, pour célébrer nos 25 ans de vie religieuse, en communion avec nos frères laïcs, sans oublier ceux qui nous précédés dans la maison du Père. Tout est grâce ! C’est le Christ qui fait de nos vies un chemin.
La vie religieuse est un lieu d’appel pour le voyage, pour l’écoute de l’appel ! Cet appel n’est pas unique. Elle est multiple. Chacun dans son état, nous sommes tous au service du Règne de Dieu. Au fil des années, laïcs ou religieux, l’Assomption en nous se va gravant. Et nous sommes plus que fiers aujourd’hui, de te dire combien nous t’aimons et voulons poursuivre notre marche, à la suite du Christ pauvre, chaste et obéissant.
En ce jour tant mémorable, ma mémoire ravive le souvenir d’une aventure, avec ses hauts et ses bas, de plusieurs frères et sœurs, compagnons de vie, laïcs et religieux, chez qui j’ai admiré un certain nombre de qualités. Grace à eux, assomptionniste aujourd’hui, je suis.
Notre aventure à la suite du Christ a commencé en septembre 1993 à Butembo, dans le Nord-Kivu, à l’Est de la République Démocratique du Congo, dans la congrégation des Augustins de l’Assomption. Nous étions un groupe de 18 jeunes gens, pleins de vie et enthousiastes, désireux de découvrir et de faire partie de l’assomption. Il s’agissait de : Jean de Dieu Katembo Kamundu (Kilindera-Kyondo), Ignace Katembo Muvikwa (Butungere-Bunyuka), Kabuyaya Mulaghalya Emmanuel (Butembo), Kakule Muvunga Tardif Deogratias (Vusokoli-Bunyuka), Évariste Paluku Kalalamwaka (Busaghala-Bunyuka), Gratien Paluku Kitoti (Mutwanga), Sébastien Bangandu Mwanza (Kinshasa), Jean-Baptiste Kakule Balengehya (Mavoya), Marie-Jules Paluku Matumo (Mavoya), Kahindo Baruti (Mabambi-Muhangi), Girafe Paluku Kagheni (Beni), Faustin Kakule Kanyirume (Kyondo), Pierre Claver Wendo Rumwagira (Uvira), Jean-Bosco Paluku Syavuyirira (Kirumba), Melchior Kakule Vanzwa (Vuletse-Kyondo), Jean-Marie Paluku Kinzanga (Vukoroghoto-Bunyuka), Anselme Paluku Mwenge (Bulambo-Bunyuka), Symphorien Kambale Wavirire (Kasitu-Kitatumba). Nous étions postulants dans les communautés de la Maison Kindugu (COPHACO), Kambali et Kitatumba.
Le noviciat Lwanga, Bosquet Initiatique, nous a accueillis le 15 septembre 1994. Notre promotion fut baptisée ‘Saint Luc’, en souvenir du père Lucas Chuffart, maître des novices sortant. A notre arrivée à Lwanga, le frère Richard Mahungu, qui reprenait l’année du noviciat s’est joint à nous, ainsi que deux autres confrères d’origine tanzanienne venus de Nairobi pour cheminer ensemble comme novices : Boniface Kisi (Arusha) et Joseph Abdala lebay (Dar es salaam). Nous étions alors 18 confrères novices.
La communauté était formée de René Mihigo (Maître des novices), Michael Tsongo (stagiaire post-philosophique), Ignace Mulekya (économe). Le Père Marc Champion est demeuré avec nous pendant un mois et nous a initié à un exercice intéressant qui consistait à écrire chaque jour une petite réflexion en vue de convertir un ami païen par correspondance écrite. Le père Victor Ndakasi qui rentrait des États-Unis est resté avec nous pendant deux semaines, avant de regagner sa nouvelle communauté. Les deux premières semaines du noviciat nous avons eu des anges gardiens, c’étaient les novices de la promotion avant nous, qui se préparaient à émettre les premiers vœux.
Nous avons connu une année d’expérience merveilleuse : connaissance profonde du Père d’Alzon, la Règle de vie, le charisme et la spiritualité assomptionniste, la grande famille de l’Assomption… Sans oublier l’inter noviciat qui nous permettait d’entrer en contact direct avec la grande famille de l’Assomption présente à Butembo et dans le monde. Parmi les cours organisés, il y avait Saint Augustin, Théologie de la vie religieuse, Histoire de la vie religieuse, Histoire du diocèse de Butembo-Beni, Liturgie, etc. Nous nous souvenons encore des liturgies bien animées, des temps de prière et de méditation, des loisirs et des sorties communautaires, de l’apostolat à Brazza et à la prison de Kakwangura, de l’expérience apostolique de deux semaines en paroisse.
L’événement le plus marquant fut alors l’émission des premiers vœux dans la congrégation des Augustins de l’Assomption, le 28 août 1995, entre les mains du père Giuliano Riccadonna, alors supérieur provincial, dans l’église paroissiale de Kitatumba. Nous étions alors 16 novices. Ce fut un moment de grande joie et d’espérance !
Les études philosophiques au scolasticat Saint Augustin de Bulengera nous ont ouverts à un mode de vie et de réflexion profonde qui nous habilitait à prendre du recul et à nous interroger sur le sens de notre existence et la couleur que nous allions donner à notre destinée, à la suite du Christ à l’Assomption. Après le premier cycle d’études philosophiques, ce fut la grande dispersion. En effet, après différents stages post-philosophiques, les uns abordaient le deuxième cycle de philosophie, les autres entamaient les études théologiques à Kinshasa et Nairobi.
Il y eu aussi, Seigneur tu le sais, des moments d’épreuves et des tempêtes, des séparations douloureuses, surtout avec l’appel à la maison du Père de Faustin Kanyirume (Kyondo) et de Pierre Claver Wendo Rumwagira (Uvira), que nous confions humblement à ta miséricorde. Nous avons aussi connu des départs de certains de nos confrères, compagnons de route, dont l’amitié et l’attachement restent encore profondes.
Sur ces routes humaines, laïcs ou religieux, tu as fait de nous des pèlerins, sur ce long chemin qui va de la tête au cœur chez tout humain, car il n’est rien de nous, rien qui ne soit à évangéliser. La fidélité dans l’engagement, c’est d’abord l’affaire de Dieu. Nous ne sommes que des instruments de sa miséricorde. En tant que telle, elle représente un grand défi, mais c’est surtout une grâce et, en fin de compte, une consolation.
Bien que Dieu nous appelle de manière personnelle, j’éprouve un grand besoin de le remercier pour le don de la communauté, qui valorise nos différences et favorise la collaboration, dans une syntonie qui fait notre force et notre joie. Les missions reçues, les voyages, les rencontres, m’ont aidé à aller à la découverte des hommes, et surtout d’un Dieu qui n’est plus immuable, mais un Dieu du camping, qui fait camper et décamper, un Dieu qui bouge et qui fait bouger, un Dieu qui s’est plus révélé à des nomades, à des hommes et des femmes en quête de l’Inconnu. D’Abraham jusqu’aux Rois Mages, en passant par l’expérience des enfants d’Israël, on est au contact d’un « Dieu de la bougeotte » (Alain Roy).
Les joies et les peines, les à-coups du chemin, la vie fraternelle en communauté, ont contribué à élargir mon univers et mon regard sur la réalité de la vie au quotidien. Ils m’ont appris le sens de la fraternité, de la cordialité, de l’accueil bienveillant et inconditionnel. Je remercie le Seigneur pour ces terres de mission, ces passages et ces transitions qui, au fil des années et de mille manières, ont façonné la personne, le religieux que je suis.
Enfin, Jean de Dieu Kamundu, Tardif Muvunga, Symporien Wavirire, Ignace Muvikwa, Melchior Vanzwa, Jean-Bosco Syavuyirira, Sébastien Mwanza ainsi que nos frères laïcs, sommes tous invités à grandir, à nous laisser pétrir pour devenir un peu plus ce que nous devons être, sous le regard de Dieu.
En ce jour d’action de grâce, nous voulons remercier le Seigneur qui a disposé temps et lieu, vie et santé pour que nous puissions célébrer, "en mode confinement", cet événement important de notre cheminement religieux et humain.
Dans le même élan, nous remercions sincèrement l’Assomption qui, à travers ses institutions, ses formateurs et accompagnateurs, continue de nous motiver à être, à l’instar de Saint Augustins des chercheurs de Dieu et des vrais fils du père d’Alzon. Grand merci également à nos familles, biologiques et adoptives, à nos amis et connaissances, ainsi qu’à ceux et celles que Dieu a mis sur le chemin de notre vie.
Enfin, nous n’avons fait qu’une escale. La route est encore longue. Mais avec le pape François, nous voulons « regarder le passé avec reconnaissance, vivre le présent avec passion et embrasser l’avenir avec espérance. » A travers notre cheminement, c’est l’amour infini du Seigneur qui a choisi la finitude pour se manifester. Nous n’avons pas assez de chaque jour pour rendre grâce. Merci Seigneur pour ta bonté et ton amour !
Sébastien Bangandu Mwanza, a.a.
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